Jeudi 28 avril 2016, dans la salle François Mitterrand du Conseil Départemental, s’est tenue l’Assemblée générale de l’ANDAVI. Retrouvez ci-dessous le rapport moral pour l’année 2015 établi par le président de l’association, Monsieur Jérôme Moreau.
Comme chaque année, il m’appartient de vous livrer les quelques mots qui jalonneront mon rapport moral et je souhaite le placer, pour débuter, sous les solides augures des principes qui structurent notre engagement associatif.
C’est aussi l’occasion de vous livrer des réflexions personnelles, et donc partiales et partisanes de l’inclination stratégiques que nous souhaitons voir instituer dans le cadre des politiques publiques générales de l’aide aux victimes.
Ce rapport moral, comme chaque année, sera aussi celui de la traduction des actions que notre mouvement dans son entier, déploie en France et nous considérons que nos combats sont justes.
Nietzsche écrivait « les vérités éclairent, celles que l’on tait sont vénéneuses. », je vais donc essayer, ce soir, de vous parler vrai.
L’année 2015 a débuté et s’est terminée par des actes qui ont porté une atteinte irrémédiable à nos libertés, cette année a été émaillée par différents évènements auxquels nous savions pouvoir être, un jour confrontés, peu imaginable en réalité, mais qui nous ont frappé comme beaucoup d’ailleurs.
Ces faits ont nécessité un déploiement substantiel et exceptionnel de nos moyens et je le dis clairement, tant les membres de la Cour d’appel et en particulier Monsieur Graviou, et les chefs de juridiction de Nevers que les services de la Préfecture nous ont témoigné de leur soutien et de leur appui.
La vie d’une association d’aide aux victimes est traversée par l’urgence, la confrontation aux faits qui commandent réactivité et résilience face à l’évènement.
Il s’agit d’une vie associative, dont les missions sont appelées sans nul doute à s’amplifier, à s’organiser différemment, et dont l’évolution reste irrémédiablement ancrée aux changements légaux, aux bouleversements juridiques et aux nouvelles attentes de la part des décideurs des politiques publiques de l’aide aux victimes.
En nous engageant, bénévoles et salariés, dans la voie de l’aide aux victimes, nul ne pouvait imaginer que l’année 2015 serai aussi rude pour notre réseau qui a fait face, qui s’est appuyé sur l’expérience des procès collectifs, et sur la force de mobilisation de 140 associations idéalement déployées sur le territoire.
Force est de constater que l’actualité nous a rattrapé par les drames redoutables liés aux attaques terroristes de grande ampleur, par des accidents collectifs dévastateurs qui ont commandé d’agir en urgence.
Notre action s’oriente principalement envers celles et ceux qui meurtris, dans leur chair et dans leur âme, espèrent souvent en silence, réponse, écoute, attention, réparation et reconnaissance.
Bien sûr, le mouvement de l’aide aux victimes est puissants et dispose d’une capacité d’union et d’action, mouvement unique et savamment structuré en France.
Bien sûr, le mouvement de l’aide aux victimes a anticipé de multiples scénario qui ont forgé son expérience et sa reconnaissance.
Comme à l’accoutumée, notre association, avec l’aide et le soutien sans faille de notre fédération, a su remplir ses missions par l’engagement de ses membres et de son équipe.
« Le temps passe, c’est son métier » comme l’écrivait Jean D’Ormesson.
Le temps des victimes, de l’écoute, de la réparation, de la restauration est souvent perçu comme immobile par celles et ceux qui souffrent.
Le temps des victimes n’est pas le temps du juge, le temps des victimes n’est pas le temps de l’opinion, ce n’est pas le temps de la société et ce n’est pas le temps du doute et des confrontations, mais tout est utile à la manifestation de la vérité.
Notre combat, notre engagement, la flamme qui anime, c’est de répondre à ces paradoxes.
Ainsi, va la vie et il faut l’accepter car « le temps est une lime qui travaille sans bruit » nous enseigne Confucius.
Nous agissons tous les jours, pour agir sur ce temps qui passe, pour soutenir au quotidien comme en perspective, l’action collective en faveur du droit des victimes, à sculpter les possibilités que nous offre le droit, et pour rendre efficient le soutien que doit apporter, aux victimes, une société responsable et solidaire.
Il nous appartient de faire qu’aucune rupture ne puisse, consciemment ou inconsciemment, s’opérer entre le temps de l’enquête ou de l’instruction et le temps du procès.
Notre combat, notre seul enjeu collectif, c’est la construction d’une protection objective et non partisane des victimes, qui se renforce au fil du temps, dans la Nièvre.
Nous constituons certainement les bâtisseurs d’un nouveau temps, celui de l’aide aux victimes, nous souhaitons activer et renforcer leurs droits sans jamais détruire ou restreindre les droits des infracteurs.
Pour nous, il est fondamental que le temps n’altère pas les souffrances mais les accompagne pour les dépasser au décours d’un processus longs, difficiles et complexes.
Les chantiers, dans la Nièvre, ont été jusqu’alors nombreux, mais les perspectives qui s’ouvrent à nous le sont encore plus.
Nous sommes des architectes de l’ombre, une équipe associative comme il existe beaucoup d’autres sur le territoire, qui forge, jour après jour, le quotidien de l’efficience des droits, qui s’attachent, pierres après pierres, à construire un édifice de protection et d’appui à ces justiciables égarés ou perdus dans les labyrinthes du droit, dans les nimbes ténébreuses de procédures juridictionnelles souvent absconses voire impénétrables pour nombre de justiciables qui franchissent les seuils de nos permanences.
Nous n’avons qu’un seul devoir, soutenir en tout lieux, en toute circonstance et à tout moment celles et ceux qui viennent courageusement frapper jusqu’à nos portes.
Ce chantier de l’aide aux victimes suppose un postulat : une présence quotidienne, territorialement maillée, et toujours efficiente car lorsque l’architecte s’éloigne des travaux, le chantier souffre.
C’est pourquoi, personne ne peut s’en éloigner.
Notre ouvrage ne connaît ni la fatigue, ni le découragement, la construction du service de l’aide aux victimes dans la Nièvre suppose que nous soyons vigilants sur les accompagnements réalisés, humbles face à aux personnes que nous rencontrons, mais pétris par l’ambition que notre combat est juste et vecteur de progrès.
Nous sommes toujours en construction de ce bel ouvrage, malgré les changements et les doutes, malgré les intempéries financières, malgré les évènements inattendus ou les obstacles que nous pensions initialement dirimants.
Pour aboutir à la perfection de notre édifice, perfection dont nous savons qu’elle ne sera qu’une utopie inatteignable, nos outils sont simples : lois, codes, règlements, chartes internationales, droits fondamentaux.
Pour parvenir à consolider notre œuvre, nous sommes animés d’une force de mobilisation irrépressible et par l’expérience de 15 années d’action.
Sébastien Le Prestre de Vauban écrivait « l’art de fortifier ne consiste pas dans des règles et dans des systèmes, mais uniquement dans l’expérience. »
Nous avons choisi une ligne de conduite : celle de la pugnacité de poursuivre notre mission de service public avec engagement et conviction, avec force et vigueur, avec la certitude de la légitimité de notre combat en faveur de la dignité des victimes, avec audace et cohérence, avec la conviction, chevillée au corps, du nécessaire équilibre entre différentes parties au procès afin que chacun retrouve sa juste place dans la société.
Robert Badinter estimait à juste titre que « faire des miracles avec peu de choses, c’est le miracle de la sainteté ».
Nous n’avons pas la prétention d’être des saints mais seulement des disciples de nos principes d’action structurante sous l’égide de nos autorités de tutelle et de contrôle auxquelles nous nous référons régulièrement.
Pour soutenir cette structuration de cette politique cardinale, plusieurs éléments ont été patiemment orchestrés dans la Nièvre destinés à étayer notre action :
Nous ne pourrions pas, seuls, localement, faire prospérer le service public de l’aide aux victimes, de manière aussi proactive et aussi sérieuse, aussi territorialisée et aussi dense sur la qualité de nos accompagnements, sans nos partenaires historiques ou nouveaux et nos fidèles financeurs.
Ministère de la justice par le truchement de la cour d’Appel et du Tribunal de Grande instance, Préfecture de la Nièvre, Délégation régionale et départementale aux droits des Femmes, DDCSPP, Conseil Général de la Nièvre, Mairie de Nevers, Cosne-sur-Loire, Decize, Château-Chinon, Clamecy et la Charité-sur-Loire, MDPH, CPAM sont tous de précieux appuis, des conseilleurs avisés, des financeurs bienveillants, d’acteurs locaux engagés, qui nous soutiennent pour faire éclore cette vision de l’aide aux victimes.
Cette année, l’INAVEM aura 30 ans, l’ANDAVI aura 15 ans et, pour conclure, je souhaite vous faire partager mon goût immodéré à mon corps défendant, de la citation.
Antoine Dertin écrivait : « La douce illusion ne sied qu’à la jeunesse et déjà l’austère sagesse vient m’avertir tout bas que nous avons passé ensemble quinze merveilleux hivers. »
Espérons que pour les 15 prochaines années, notre mouvement soit toujours aussi forte et structuré pour renforcer la dignité, la liberté des victimes qui dans nos permanences crient moins vengeance que souffrance.
Je vous remercie.