Pourquoi les besoins individuels des victimes et l’évaluation des risques sont-ils essentiels à leur soutien et à leur protection ?
Pourquoi les besoins individuels des victimes et l’évaluation des risques sont-ils essentiels à leur soutien et à leur protection ?

Rédigé par Miren Spek,
Service d’aide aux victimes et aux témoins, Croatie


08/01/2024

L’infraction n’est pas seulement une atteinte à la société, mais aussi une violation des droits individuels des victimes. Les victimes doivent par conséquent être reconnues et traitées avec respect, sensibilité et professionnalisme, sans discrimination d’aucune sorte ni d’aucune raison. En règle générale, l’État dans lequel une infraction a été commise est responsable de la victime, car il n’a pas été en mesure de la protéger, soit en raison d’une défaillance de la sécurité ou de l’ordre social, soit parce qu’il n’a pas assuré son accès à la justice, à l’indemnisation ou à la réparation. Alors que la directive 2012/29/UE du Parlement européen établit les normes minimales concernant les droits, le soutien et la protection des victimes d’infractions, certaines victimes restent exposées à un risque de victimisation secondaire et répétée, d’intimidation et de représailles de la part de l’auteur de l’infraction au cours de la procédure pénale. Ce risque peut découler des caractéristiques personnelles de la victime ou du type, de la nature ou des circonstances de l’infraction. Ce n’est qu’en procédant à des évaluations individuelles [1], le plus tôt possible, que ces risques peuvent être identifiés efficacement.

La littérature professionnelle (juridique et psychologique) et la législation européenne en la matière [2] recommandent vivement de procéder à une évaluation individuelle des besoins et/ou des risques pour toutes les victimes afin de déterminer si elles sont exposées à un risque de victimisation secondaire et répétée, d’intimidation ou de représailles, et quelles sont les mesures de protection spéciales dont elles peuvent avoir besoin. En évaluant les besoins et les risques des victimes, la police, le ministère public ou les fonctionnaires du tribunal peuvent "adapter" les mesures de protection à la victime individuelle, ainsi qu’à sa situation professionnelle et privée. Des ajustements sont également prévus pour les enfants ou les autres membres de la famille de la victime. En outre, si une victime est blessée, elle aura besoin d’une assistance médicale ; ou si elle est victime d’une infraction haineuse, elle aura besoin de politiques [3] et de mesures de protection des données ciblées.

Les mesures de protection adaptées doivent être pratiques dans leur mise en œuvre et faciles à vivre pour la victime. Les préoccupations et les craintes des victimes concernant la procédure doivent être un facteur clé pour déterminer si elles ont besoin de mesures spécifiques.

Une fois que les besoins de la victime ont été identifiés, l’étape suivante consiste à mettre en place la protection ou l’aide appropriée, ce qui est possible grâce à l’utilisation de mécanismes d’orientation et au partage des résultats de l’évaluation. Certaines organisations européennes d’aide aux victimes ont une grande expérience en matière de protection et d’aide aux victimes. Elles offrent un soutien psychologique et psychosocial, une aide juridique primaire et peuvent couvrir les frais de représentation en justice des victimes (avocats), un hébergement (sûr), une psychothérapie, un accompagnement au cours de la procédure pénale, etc. [4]

Des mesures de protection doivent être élaborées pour chacune des étapes auxquelles la victime est confrontée, par exemple pendant ou après un procès/une procédure. Les policiers doivent procéder à une évaluation des risques pour déterminer si une victime risque d’être intimidée ou victimisée [5]. Les enquêtes doivent déterminer s’il est possible d’éviter les contacts entre les victimes et les accusés dans les lieux où les deux peuvent être présents en raison de la victimisation.

Une série de mesures peuvent être mises en place pour protéger une victime lorsqu’elle témoigne au tribunal ou au bureau du procureur : le contact visuel entre les victimes et les accusés peut être minimisé avant, pendant et après la déposition en utilisant des technologies de communication audiovisuelle ou en filtrant la victime dans la salle d’audience ; les questions inutiles sur la vie privée de la victime doivent être évitées. Toutefois, une fois le procès terminé, il peut encore être nécessaire de protéger la victime, les témoins ou d’autres membres de la famille.



[1Les évaluations individuelles doivent prendre en compte les caractéristiques personnelles de la victime, telles que l’âge, le genre et l’identité ou l’expression de genre, l’appartenance ethnique, la race, la religion, l’orientation sexuelle, la santé, le handicap, le statut de résident, les difficultés de communication, la relation ou la dépendance à l’égard de l’auteur de l’infraction et l’expérience antérieure de l’infraction. Ils doivent également tenir compte du type ou de la nature et des circonstances du délit, par exemple s’il s’agit d’un délit de haine, d’un délit de partialité ou d’un délit commis pour un motif discriminatoire, d’une violence sexuelle, d’une violence dans une relation étroite, si l’auteur du délit était en position de contrôle, si la résidence de la victime se trouve dans une zone à forte criminalité ou dominée par des gangs, ou si le pays d’origine de la victime ne se trouve pas dans l’État membre où le délit a été commis.

[2Directive 2012/29/UE du Parlement européen et du Conseil relative à l’établissement de normes minimales concernant les droits, le soutien et la protection des victimes des infractions, Stratégie de l’UE sur les droits des victimes (2020-2025), Modèle de guide sur l’évaluation des besoins individuels des victimes de crimes de haine élaboré par le BIDDH ; Directive 2011/36/UE du Parlement européen et du Conseil concernant la prévention de la traite des êtres humains et la lutte contre ce phénomène, ainsi que la protection des victimes ; Manuel des TPE pour la mise en œuvre de la législation et des meilleures pratiques en faveur des victimes d’infractions en Europe ; Règlement (UE) n° 606/2013 du Parlement européen et du Conseil relatif à la reconnaissance mutuelle des mesures de protection en matière civile.

[3La protection des données est essentielle à la protection de la vie privée, de la santé et de la sécurité des victimes. Elle vise à garantir que les coordonnées et les informations personnelles des victimes, ainsi que les informations relatives à l’infraction, ne soient pas communiquées à des personnes non autorisées à les recevoir. Par exemple, il est essentiel que les noms et adresses des victimes de harcèlement et d’abus domestiques ou des victimes dont l’identité est protégée ne soient pas accessibles à l’auteur de l’infraction. Les procédures de protection des données et de sécurité de l’information doivent garantir le respect de cette exigence de protection.

[4Manuel pour la mise en œuvre de la législation et des meilleures pratiques pour les victimes des infractions en Europe, Victim Support Europe.

[5Par exemple, des ordonnances d’interdiction d’accès, des ordonnances restrictives ou des ordonnances de protection peuvent être nécessaires au cours de l’enquête et doivent être disponibles immédiatement, sans que la victime n’ait à supporter de charges financières ou bureaucratiques excessives. Si le suspect est libéré sous caution, mais qu’il existe toujours un risque qu’il menace, intimide ou blesse la victime ou tout témoin associé, des conditions strictes de mise en liberté sous caution doivent être fixées, par exemple en stipulant que le suspect/accusé ne doit pas contacter la victime ou s’approcher à une certaine distance de son lieu de travail ou de son domicile.

France Victimes 58 - ANDAVI, Association Nivernaise D'Aide aux Victimes d'Infractions